Le jour où la France a légalisé le " consentement " sexuel des enfants

Projet Publié le 22.02.2018

Communiqué de Presse de l’AIVI

22 février 2018

Les Français sont scandalisés par l’affaire de Pontoise où la petite Sarah de 11 ans était considérée par la justice comme « consentante » à des actes sexuels avec un adulte de 28 ans. « La question ne devrait même pas se poser ! » disent les 400.000 signataires d’une pétition pour réclamer un seuil légal à 15 ans. Ce qu’ils ignorent et qui est stupéfiant, c’est que ce seuil légal existait dès 1863 avec une double limite à 21 ans pour l’inceste et 13 ans dans les autres cas. C’est en 1980 que la loi change et décrète que l’enfant est présumé « consentant » à tout âge jusqu’à ce qu’il fournisse la preuve du contraire, comme le montre une enquête que l’Association Internationale des Victimes de l’Inceste a menée avec des historiens et des avocats.

Dès 1832, le législateur fixe un âge au-dessous duquel la violence sera toujours présumée, par la raison que l'enfant n'a pas encore le discernement nécessaire pour donner un consentement sérieux et libre. Cet âge est celui de onze ans révolus. La peine est alourdie dans les cas d’inceste, lorsque « les coupables sont les ascendants ».

En 1863, la protection des mineurs est renforcée. La limite de l’attentat à la pudeur est portée à 21 ans pour l’inceste et 13 ans dans les autres cas. En se basant uniquement sur l’âge de la victime, et sur le lien de famille, le législateur déclare que :

  • aucun mineur (moins de 21 ans) ne peut consentir à l’inceste
  • aucun enfant de moins de 13 ans ne peut consentir à un acte sexuel

Le député rapporteur de la loi du 6 mars 1863 explique : « Le code pénal de 1810 ne punissait l'attentat à la pudeur que lorsqu'il était accompagné de violence. Ainsi, toutes les fois qu'un enfant n'avait opposé aucune résistance aux moyens employés pour le séduire, et lorsqu'un simulacre de consentement avait été obtenu de sa faiblesse ou de son ignorance, le délit demeurait sans répression.(…) qui oserait affirmer que, dès qu'il a dépassé onze ans, l'enfant est capable de donner un consentement réfléchi ? Le plus souvent, même à douze ans, son développement physique ou intellectuel ne lui permet pas d'avoir une conscience entière de ses actes, et si quelques exceptions se rencontraient, quel inconvénient sérieux y aurait-il à le prémunir contre ses propres entraînements et à le préserver d'une dégradation précoce ? (…) S'il est permis de supposer une volonté intelligente et libre chez un enfant âgé de plus de treize ans, cette volonté libre n'est plus certaine si la sollicitation lui arrive d'un de ses ascendants, c'est-à-dire d'une personne qui exerce sur lui une autorité naturelle. »

Cette limite de 13 ans, appelée à tort « majorité sexuelle », est portée à 15 ans par une ordonnance de juillet 1945.

C’est au cours des années 1970 et 1980 que, sous la pression active des lobbys pédophiles, les lois réprimant les infractions sexuelles contre les enfants sont adoucies en faveur des agresseurs. Comme l’explique l’historienne Fabienne Giuliani de l’université Paris I: « Ce qui a fait "sauter" la notion de non-consentement automatiquement décidée en dessous d'un certain âge (15 ans pour le viol et 13 pour l'attentat à la pudeur depuis 1863), c'est la réforme des violences sexuelles décidées en 1980. Il appartient désormais aux victimes de prouver la contrainte...  sous couvert de moderniser l'arsenal juridique français sur les violences sexuelles, la réforme de 1980 a donc en  réalité crée un vide juridique favorable aux agresseurs en laissant à la libre appréciation des magistrats la question du consentement... »

Les agresseurs plaident depuis toujours le « consentement ». Depuis la loi de 1980 confirmée par le Code Pénal de 1994, ils ont tout intérêt à le faire, car la peine encourue est fortement allégée si l’enfant est considéré comme « consentant » quel que soit son âge. Les odieuses théories pédophiles de l’enfant consentant voire séducteur s’expriment librement à chaque nouveau procès !

La société civile vient de découvrir l’aberration de notre loi actuelle qui ne protège plus nos enfants depuis 1980. Cette prise de conscience est un pas en avant. Face à l'inceste milite depuis 18 ans pour changer cette loi ouvertement favorable à l’impunité des agresseurs.

Alors que le Gouvernement et le Parlement travaillent à légiférer pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles, voici ce que nous demandons pour protéger nos enfants :

1)     La création d’un « crime d’inceste » défini comme tout acte sexuel sur un mineur commis par un membre de sa famille.

2)    L’interdiction absolue pour un adulte d’avoir une relation sexuelle avec un mineur de moins de 15 ans (18 ans pour l’inceste).

Au-delà du volet législatif et répressif, on peut également se reporter au Manifeste 2018 de Face à l'inceste qui comporte 29 propositions concrètes pour développer la prévention des violences sexuelles sur mineurs, rendre obligatoire la formation des professionnels concernés, et améliorer la prise en charge des victimes.


>> Lire notre étude sur le "consentement" des mineurs dans le code pénal de 1810 à 2018

>> Signer notre pétition: Inceste: aucun consentement de 0 à 18 ans ! Aucune prescription !